Côtes-d’Armor : tout juste réensablée, l’unique plage de Saint-Brieuc est toujours menacée de disparition
Patrice Le Goualher et Henri Alloy, coprésidents de l’association Sauvons la plage du Valais, estiment que si la plage est métamorphosée, ce n’est qu’en apparence… LP/Solenne Durox
Ils vont et viennent, déposant chacun à leur tour sur l’estran leurs tas de sédiments noirs, un mélange de sable et de vase, dragués à seulement quelques centaines de mètres de là dans l’avant-port du Légué (Côtes-d’Armor). Patrice Le Goualher observe ce ballet ininterrompu de tracteurs remorques avec attention. « Ça se passe comme ça tous les jours à marée basse, toute l’année, cinq fois par semaine. C’est vraiment les Shadoks », ironise le coprésident de l’association Sauvons la plage du Valais. En réalité, ces opérations qui coûtent la bagatelle de 1 million d’euros par an, ne le font pas vraiment rire.
Depuis la création du môle et des quais d’accostage dans l’avant-port du Légué en 2003, toute la zone est soumise à̀ un envasement permanent. Afin de permettre aux quelques navires de commerce d’accéder au port, on cure continuellement, à raison de 160 000 m3 par an. Cela représente au moins 10 000 rotations de tracteurs. « Voyez, ils mettent tout ça en face de la réserve naturelle et de la plage », peste-t-il.
Voilà de nombreuses années que l’association s’échine à sauver l’unique plage de Saint-Brieuc, la grève du Valais. Celle-ci tient sa renommée de ses jolis cabanons colorés nichés sur la falaise et installés à l’époque des premiers congés payés. Mais l’image de carte postale n’est plus et ce, depuis longtemps.
Baignade déconseillée
Le banc de sable qui s’est formé face à la plage, à cause des dépôts de sédiments selon l’association, a modifié les courants, piégeant les algues vertes. La plage envasée, devenue trop dangereuse, a même été fermée l’année dernière. « Elle avait commencé à revivre lorsque les dépôts de sédiments s’étaient arrêtés de 2020 à 2022. Ils étaient alors stockés à terre mais vu qu’ils n’arrivent pas à les valoriser, le dragage a repris », se désole Patrice Le Goualher. « Rendez-vous compte, pour une tonne de marchandises qui arrive dans ce port, il faut enlever une tonne de vase », souligne Henri Alloy, l’autre coprésident de l’association.
Grâce à leur mobilisation, les habitants ont réussi à obtenir une première victoire à savoir le réensablement de la plage. « C’était une promesse de campagne et nous l’avons tenue. On va faire une belle fête cet été », affirme Hervé Guihard, le maire de Saint-Brieuc. 2 000 m3 ont ainsi été prélevés sur le banc de sable partiellement arasé qui entravait les courants naturels de l’eau.
Une première étape qui ne satisfait pas pleinement l’association. Si la plage est métamorphosée, ce n’est qu’en apparence. « Il aurait fallu curer la vase avant de mettre le sable dessus », remarque Patrice. Et puis, à quoi bon poser une serviette sur cette plage alors que s’y baigner est fortement déconseillé ?
La grève du Valais fait en effet partie des plages bretonnes où il ne fait pas bon faire trempette, la qualité de l’eau y étant insuffisante depuis plusieurs années. La buse de l’avant-port rejette sur la plage des eaux polluées aux métaux lourds et germes fécaux. Le maire de Saint-Brieuc affirme avoir mis en demeure il y a trois semaines le syndicat mixte qui gère le port de mettre fin à cette pollution.