Avec ses «foglietti», cette Nantaise redonne vie aux fiches de notes

Le Figaro Nantes

Des porte-plumes, des bâtons de cire à cacheter, des sceaux… et surtout de nombreuses fiches cartonnées. Un petit coin de paradis pour les amateurs de papeterie s’est installé il y a quelques mois dans le centre-ville de Nantes. En janvier, au moment d’ouvrir sa boutique Foglietto, Émeline Pedemonte a découvert par hasard que cet emplacement n’était pas anodin. Du XIXème au XXème siècle, dans cette même rue Santeuil, la papeterie d’une certaine Madame Pottin régnait en maître dans la cité des Ducs.

Un joli signe pour la trentenaire passionnée de beaux objets et qui commercialise depuis 2019 des «foglietti», des petites fiches de notes. «Le cahier n’est plus adapté à la façon dont on travaille. C’est très figé. J’ai imaginé quelque chose de plus créatif et flexible», explique l’entrepreneuse qui s’est inspirée des «index card», ces «fiches cartonnées inventées au XVIIIème siècle en Angleterre et diffusées pendant deux siècles». Celles-ci ont longtemps été utilisées comme catalogues de bibliothèques ou pour les fichiers clients de différentes corporations.

La fondatrice, née à Nantes et mariée à un italien, s’est familiarisée avec le domaine de l’édition lorsqu’elle était étudiante. Elle était alors chargée de la création d’une revue interdisciplinaire. C’est à ce moment-là qu’elle a commencé à collaborer avec le fabricant historique de papier Fedrigoni, à qui elle fait toujours appel aujourd’hui. Leur papier très épais recyclé à 80% est acheminé en France, dans le Maine-et-Loire, où il passe d’abord par la case imprimerie. Une fois recouvert de lignes ou de carreaux, il est décortiqué et assemblé par des travailleurs handicapés d’un ESAT. Depuis janvier, la préparation des colis se fait directement dans les nouveaux locaux de Foglietto (terme italien qui signifie petite feuille de papier, NLDR).

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Des produits vendus dans le monde entier

Pendant trois ans, Émeline Pedemonte commercialisait ses produits dans le monde entier grâce à internet et via des revendeurs situés aux quatre coins de la planète. Les fiches ont même circulé au musée du design à Londres. Après avoir accéléré les recrutements – l’équipe 100% féminine est composée de six personnes -, la fondatrice s’est mise en recherche de locaux. En visitant un grand local de 116m2, l’idée lui est venue d’ouvrir un coin magasin pour mettre en avant ses fiches et revendre quelques produits dérivés d’autres marques triées sur le volet : made in France si possible ou production soucieuse de l’environnement. Après avoir sollicité sa communauté via une cagnotte Ulule pour l’aider à financer les surcoûts de travaux évalués avant les crises liées au Covid et à l’Ukraine, son échoppe a pu voir le jour.

L’ancienne chargée de communication a conscience de proposer des produits «pas donnés» : il faut compter environ 4,50€ pour 25 fiches (de format A6 ou A7). Mais le «made in France» a un prix. Émeline Pedemonte se défend de vendre l’équivalent de simples fiches bristol : il s’agit d’un univers et d’une méthode d’organisation. Certains clients se réfèrent à son concept pour apprendre les langues étrangères, pour leurs révisions, ou d’autres à travers la méthode Kanban qui permet de trier les tâches à faire/en cours/faites. «Certains les utilisent aussi pour mieux se répartir la charge mentale au sein du couple!», tandis que des professionnels y ont également recours.

Même chez Foglietto, les employées s’en servent. Ce qui ne les empêche pas de jongler avec un calendrier informatisé Google. «Je ne suis pas anti-numérique. Les deux sont complémentaires», termine la chef d’entreprise, qui avait organisé une petite fête mardi dernier pour inaugurer le magasin.