On a testé… Copilot Pro, l’IA destinée à la suite bureautique Microsoft 365

Disponible depuis la mi-janvier, c’est le moins cher des deux assistants bureautiques payants de Microsoft fondés sur l’intelligence artificielle. Résumés de texte dans Word, création de présentations dans PowerPoint, analyse de données dans Excel… nous avons fait le test.

Depuis la mi-janvier, Microsoft permet d’ajouter une intelligence artificielle, Copilot Pro, à la suite bureautique Microsoft 365 personnel ou famille. Un nouvel assistant qui, moyennant un surcoût de 22 euros par mois, aurait le pouvoir d’améliorer notre productivité, notre créativité, notre expressivité et notre capacité d’analyse, à en croire l’entreprise. Word, PowerPoint, Excel… nous l’avons testé en profondeur.

Le traitement de texte Word semble être le logiciel qui tire le meilleur parti de Copilot Pro. On peut s’adresser à cet assistant en langage naturel, directement dans le document ou dans une fenêtre à sa droite, en tapant des consignes comme « rédige un brouillon destiné à mon syndic de copropriété ; demande a Mme Dupont de décrocher le téléphone quand on l’appelle ».

Le brouillon proposé est le plus souvent correct, dégrossissant un peu le travail. Parfois même, le texte frappe juste, imaginant des détails opportuns – des fuites d’eau pour le syndic, des gâteaux et bonbons pour une fête d’école… Ces brouillons feront occasionnellement gagner quelques minutes à une bonne partie des usagers de Word, particulièrement aux personnes peu à l’aise à l’écrit.

Comme le ferait un écrivain public, Copilot Pro peut aussi transformer une déclaration d’amour maladroite en adresse lyrique ou adoucir un courrier trop agressif, changeant par exemple « Je trouve inadmissible que vous me répondiez sur ce ton » en « Je ne suis pas satisfait de la façon dont vous m’avez répondu ». Il peut ajouter une touche de chaleur à un courrier trop froid, gommant les erreurs d’orthographe et de syntaxe au passage.

L’outil est donc doué pour reformuler les textes. Reste à savoir quelle part des usagers de Word penseront à l’utiliser : pour avoir ce réflexe, il faut avoir conscience des faiblesses de son document et la lucidité de poser un diagnostic précis, sans lequel la consigne de reformulation ne saurait être pertinente.

De façon générale, la capacité de Copilot Pro à résumer étonne : ses synthèses sont claires et équilibrées, même pour les documents complexes.

Hélas, tous les dix résumés environ, l’outil commet un contresens ou une erreur grossière. Cela impose des vérifications, ce qui limite drastiquement le temps gagné. Le principal intérêt des résumés est donc ailleurs : ils permettent de trier les documents en écartant ceux qui ont de bonnes chances d’être hors sujet. Les personnes qui étudient souvent de grosses masses d’infos pourraient y gagner un temps considérable.

Les fonctions créatives et analytiques, elles, sont les moins convaincantes. Microsoft incite à utiliser Copilot Pro pour identifier les incohérences de nos textes. Mais, d’après nos tests, l’assistant se trompe 90 % du temps, ne parvenant pas à identifier les erreurs que nous y avons glissées. Il pointe toutefois occasionnellement une faiblesse à laquelle on n’a pas pensé. On lui soumettra donc les textes les plus importants, ceux que l’on veut peaufiner dans les moindres détails.

Copilot Pro peine par ailleurs énormément à fournir une solution à un problème précis, un argument pour contrer un adversaire, un plan stratégique sur un mois, etc. Beaucoup se décourageront de lui poser ce type de questions, d’autant qu’il faut patienter de dix secondes à une minute avant d’obtenir une réponse. Certains usagers auront peut-être la lucidité de ressortir Copilot Pro lorsqu’ils coincent sur un document important, quand la moindre chance de débloquer le problème sera bonne à prendre.

A noter néanmoins : côté graphique, Copilot Pro donne un accès privilégié à Designer, un nouveau service de Microsoft capable de créer des images de toutes pièces sur la base d’une consigne textuelle, grâce à l’IA. Cela permet de fabriquer des illustrations lorsqu’on ne trouve pas son bonheur dans la base d’images de Microsoft. On peut créer cent images par semaine, contre quinze avec la version gratuite, Copilot.

On a testé… le créateur d’images par intelligence artificielle gratuit proposé par Microsoft

Au-delà de Word, Copilot Pro est théoriquement accessible dans Outlook, le logiciel d’e-mails. En pratique, il apparaît seulement aux usagers employant une adresse en @live, @hotmail, @outlook ou @msn, et uniquement lorsqu’on donne cette adresse dès le départ, à la création du compte Microsoft 365 – nos tests pour remplacer a posteriori une adresse Gmail n’ont, par exemple, pas été concluants. Beaucoup de Français seront donc privés de Copilot Pro dans Outlook. Interrogée à ce sujet, l’entreprise n’a pas répondu.

Le média américain The Verge a toutefois pu en faire l’expérience. L’assistant paraît utile lorsqu’on travaille sur un projet d’équipe : il peut résumer chaque matin les multiples courriels des autres membres. A la demande, il peut aussi synthétiser une seule chaîne d’e-mails particulièrement longue, à laquelle ont participé plusieurs contacts. Bien entendu, il peut aussi créer des brouillons ou reformuler des courriels pour en améliorer le ton et l’orthographe.

Dans le logiciel de présentations PowerPoint, les usages de Copilot Pro sont plutôt rares. Les novices l’utiliseront pour modifier plus facilement une présentation créée par un collègue, en demandant par exemple qu’une diapositive soit résumée. Les usagers à l’agenda surchargé, eux, pourront demander à Copilot Pro de créer une présentation depuis zéro sur un sujet qu’ils connaissent bien. Le résultat sera exploitable environ une fois sur trois, moyennant retouches, faisant gagner un peu de temps. Impossible, en revanche, de convertir automatiquement un document texte en présentation : Microsoft travaille encore à cette fonctionnalité.

De fait, l’intégration de Copilot Pro à la suite bureautique Microsoft 365 est encore loin d’être aboutie, à en juger par les fonctions manquantes, les bugs et autres soucis ergonomiques que nous avons rencontrés. Son intégration dans le tableur Excel, par exemple, est très décevante. Ses analyses de données sont souvent banales ou erronées.

En outre, Copilot Pro est bridé : il est incapable de fournir un résumé d’une visioconférence, comme son grand frère, l’assistant – confusément – baptisé Copilot pour Microsoft 365 et facturé 30 euros par mois. Destiné aux entreprises, ce dernier est censé affiner ses réponses en fonction des connaissances partagées par les salariés de l’entreprise. En outre, il sécurise l’usage des données personnelles des salariés : elles ne sont pas utilisées pour son entraînement ni son amélioration. Copilot Pro que nous avons testé, plus grand public, ne donne pas la même garantie.

Que vaut Copilot Pro face à la version payante de ChatGPT, qui coûte aussi 22 euros mensuels et partage le même moteur d’intelligence artificielle ? D’abord, contrairement à son concurrent de Microsoft, ChatGPT est incapable de résumer les e-mails d’une équipe, d’improviser des présentations ou de structurer des documents Word à la mise en page impeccable.

Etrangement, au cours de nos tests, ChatGPT s’est rarement montré plus difficile à utiliser qu’un Copilot Pro jouissant pourtant d’un atout décisif : son intégration à chacun des logiciels bureautiques. Les choix ergonomiques de Microsoft nous ont paru alambiqués, et ChatGPT nous a donné des résultats équivalents aussi rapidement dans bien des cas. En outre, ChatGPT a réussi à synthétiser tous les documents longs que nous lui avons soumis, quand Copilot Pro butait systématiquement sur les documents de plus de cent pages.

Quid de la concurrence des IA gratuites, comme les versions standards de Copilot ou de ChatGPT, accessibles en ligne ? Leur capacité à créer des brouillons ou à reformuler des textes est certes un peu inférieure (les textes étant parfois un peu moins précis et élégants) mais, pour beaucoup d’utilisateurs, la différence ne justifie pas le prix de 20 euros par mois. En revanche, la capacité à résumer de Copilot Pro ou de ChatGPT Plus est nettement supérieure : leurs équivalents gratuits n’acceptent ni les copier-coller de textes longs, ni les copier-coller de documents texte, PDF ou autre.

L’avis de Pixels

En résumé : pas encore vraiment mûr, Copilot Pro peut être déroutant à utiliser. Il parvient assez mal à augmenter la créativité ou la capacité d’analyse de ses usagers, mais il recèle tout de même le pouvoir d’améliorer la productivité de certains utilisateurs en produisant des brouillons intelligents et des résumés. Il peut aussi aider à mieux s’exprimer. Reste qu’une version gratuite de Copilot est disponible, pas beaucoup moins convaincante : nous incitons donc chacun à les comparer pour se faire son idée.

C’est plutôt pour vous si :

vous êtes curieux et aimez découvrir les atouts cachés de vos outils ;le temps vous manque perpétuellement ;vous communiquez beaucoup, trop maladroitement à vos yeux ;vous êtes souvent noyé sous une grande masse d’infos ;vous avez l’angoisse de la page blanche.

Ça n’est plutôt pas pour vous si :

vous écrivez largement assez bien ;vous aimez le travail de précision ;vous n’appréciez pas particulièrement la suite bureautique de Microsoft ;vous vous sentez bien dans vos habitudes ;l’investissement est trop lourd.