Le macronisme face au procès en incompétence
Gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau déploie toute sa diplomatie de haut fonctionnaire pour exprimer quelques réserves dans sa lettre annuelle au président de la République, rendue publique en ce début de semaine : « Le redressement budgétaire s’impose d’abord pour la France : c’est une illusion trop longtemps entretenue que d’espérer résoudre la dérive de nos dépenses en pariant seulement sur une future accélération de la croissance. » Il ne passe pas sous silence non plus le décrochage de la zone euro par rapport aux États-Unis en matière de croissance : « L’écart cumulé de croissance depuis 1999, même rapporté à l’évolution de la démographie (PIB/habitant), est significatif : 25 % contre 38 %. Il a une cause première, ?schumpétérienne? : l’innovation. L’économie européenne a quasiment la même masse que les États-Unis, mais est loin d’avoir la même vitesse. » Une pierre dans le jardin d’Emmanuel Macron, chantre d’une « start-up nation » qui se révèle à la traîne de l’Amérique après sept ans aux affaires.
«Ã‚ Incompétence » : depuis l’annonce d’un déficit budgétaire supérieur à5 % du PIB, loin des projections gouvernementales (et des critères de convergence dans la zone euro), le mot revient sur toutes les lèvres, même parmi dans les rangs de l’opposition modérée : « Soit il y a eu un mensonge dans la construction du budget, soit il y a une incompétence », assénait la députée socialiste Valérie Rabault, ancienne rapporteuse générale du Budget, le 21 mars 2024.
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Quant aux extrêmes, ils semblent à la fête. Ce n’est pas pour rien que Marine Le Pen a dénoncé, fin mars, « l’incompétence de ce gouvernement dans le domaine financier ». Comme en écho, le député mélenchoniste Adrien Quatennens déclarait au même moment : « Ces gens-là sont de piètres économistes » qui « n’ont pas à donner de leçons aux Français ». Ces deux personnages représentent des courants politiques radicaux, suspectés ? à juste titre ? de promettre des milliards de nouvelles dépenses sans aligner, en face, les moyens de les financer. Mais seraient-ils pires que les virtuoses du « cercle de la raison », qui se montrent incapables de résoudre la crise des finances publiques et raclent les fonds de tiroir comme des forcenés pour trouver dix milliards d’euros d’économies supplémentaires ? Dix milliards sur plus de six cents que représentent les charges brutes de l’État ! Voilà la petite musique qui trotte dans une partie de l’électorat traditionnel d’Emmanuel Macron, notamment chez les séniors, qui aiment que la maison soit tenue.
La transhumance des « meilleurs électeurs »
Décevant sur son point présumé fort, l’économie, l’exécutif ne se montre pas plus rassurant sur le régalien, où les actes ont du mal à suivre les paroles. Depuis les émeutes de l’été 2023, le gouvernement est perçu comme dépassé par les événements, tandis que l’extrême droite instrumentalise avec gourmandise chaque fait divers dramatique.
Les doutes sur la compétence des tenants du « nouveau monde » commencent donc à infuser auprès des séniors, pour qui la bonne gestion de la maison France et la garantie de la tranquillité dans la vie quotidienne représentent deux valeurs fortes, selon toutes les enquêtes d’opinion. C’est sur ces deux points qu’ils ont de nouveau accordé leurs suffrages à Emmanuel Macron en 2022. Et qu’ils ont, aussi, voté plus nombreux que prévu pour la liste Renaissance lors des élections européennes de 2019.
À LIRE AUSSI Macron, l’homme aux 1 000 milliards de detteMais aujourd’hui, tout se passe comme si la compétence, le sérieux, la crédibilité n’étaient plus vraiment des critères, puisque personne ne semble réellement en mesure de les incarner. Tout se passe comme si les retraités, pourtant attachés à l’Europe plus que toute autre tranche d’âge, semblaient plus tentés aujourd’hui qu’hier par le vote RN. Et ce, alors même que la tête de liste de ce parti, Jordan Bardella, ne parle quasiment jamais de l’Europe dans ses déplacements de campagne, est un cancre au Parlement de Strasbourg et fuit les débats de fond pour se consacrer aux bains de foule et aux selfies.
À moins de 50 jours du scrutin européen, Emmanuel Macron aura besoin de mobiliser tous ses talents de persuasion, jeudi à la Sorbonne, pour enrayer la transhumance de ses « meilleurs électeurs » vers d’autres contrées électorales, contrées qui leur semblaient jusqu’alors fort peu hospitalières.
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