Le nouveau fonds d’urgence destiné à aider les agriculteurs bios en difficulté, annoncé fin janvier, va passer de 50 à 90 millions d’euros. LP/Fred Dugit.
Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a indiqué mercredi au Salon de l’agriculture que le nouveau fonds d’urgence destiné à aider les agriculteurs bios en difficulté, annoncé fin janvier, allait passer de 50 à 90 millions d’euros.
Ce plan, qui doit être encore approuvé par la Commission européenne, s’ajoute aux 104 millions d’euros d’aides versées en 2023 aux exploitants de ce secteur qui pâtit depuis deux ans d’une consommation en berne, dans un contexte de forte inflation.
«Ã‚ Le Premier ministre avait posé (fin janvier) les bases d’un fonds à50 millions d’euros et on va (le) rehausser àhauteur de 90 millions d’euros », a annoncé le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau au Salon de l’agriculture. L’idée est d’envoyer aux agriculteurs « le message qu’on a acté que les difficultés se prolongent », indique son cabinet.
Ils pourront déposer une demande dès le feu vert européen, en mars ou avril, espère le ministère, pour un versement d’ici fin juin. Sont éligibles les exploitations ayant au moins 85 % de leur chiffre d’affaires tiré du bio et ayant connu une baisse de leur excédent brut d’exploitation ou de chiffre d’affaires d’au moins 20 %.
« Coup de frein »
Après une croissance soutenue pendant plusieurs années, les ventes de produits bios, réputés plus chers et concurrencés par des labels aux critères moins exigeants ou des produits locaux, ont commencé à se retourner en 2021. Les ventes en magasins ont baissé de 5 % en 2022. « C’est un petit renversement de tendance qu’on espère momentané », a indiqué Jean Verdier, président de l’Agence bio.
Le dernier baromètre de cet organisme public chargé de promouvoir le secteur, rendu public mercredi, fait part d’un « coup de frein dans la transition alimentaire ».
Les préoccupations sur la santé et l’environnement, jusqu’à présent la principale motivation pour la consommation de bio, prennent moins d’importance dans l’esprit des 4 000 Français interrogés, qui accordent en revanche plus de valeur à la dimension plaisir de l’alimentation, selon ce baromètre.
«Ã‚ On sent la fatigue des consommateurs qui ne retournent plus autant les paquets pour lire l’étiquette », estime Laure Verdeau, la directrice de l’Agence bio. Les prochaines campagnes de promotion du bio devront, selon elle, « miser sur la charge émotionnelle et la proximité ».
Objectif : 18 % des terres dédiées au bio
Les chiffres ne sont pas encore disponibles pour 2023 mais le secteur redoute un léger mouvement de « déconversion » d’agriculteurs bio, qui couvrent désormais 10,7 % de la surface agricole utile (SAU) en France, vers le conventionnel.
Pour le lait bio par exemple, la production a reculé de 4 % en 2023 après avoir quasiment doublé depuis 2017, a souligné lundi Pascal Le Brun, président de la Coopération laitière. Un tiers du lait bio est actuellement écoulé dans la filière conventionnelle. Pour le vice-président de la Fédération nationale des producteurs de lait, Samuel Bulot, « manquer de lait bio d’ici quelques années, ce serait vraiment un échec ».
L’objectif reste toujours que 18 % des terres agricoles soient dédiées au bio en 2027, affirme le cabinet de Marc Fesneau. Mais « si on est pragmatique, on voit bien que 2024 sera une année de consolidation avant un plateau puis un nouveau départ à la hausse », ajoute-t-on.
Dans cette optique, le gouvernement a aussi présenté mercredi un programme « Ambition bio 2027 » autour de trois axes : stimuler la demande en bio, consolider les filières bios, accompagner les agriculteurs face aux enjeux sociaux et environnementaux. Le gouvernement veut notamment pousser les cantines et établissements de santé à atteindre les obligations de loi Egalim de 20 % d’approvisionnement en bio, et encourager les restaurants à ajouter du bio à leur menu.
Loin des revendications de la Fnab
Ce fonds reste loin du plan d’urgence demandé par la Fédération nationale des agriculteurs biologiques (Fnab), « à la hauteur des pertes subies par les filières, à savoir plus de 250 millions d’euros par an depuis deux ans ».
L’organisation avait fait part début février de son sentiment d’être un des grands perdants du récent mouvement de grogne des agriculteurs, entre un fonds d’urgence largement insuffisant à ses yeux et de nombreuses annonces, notamment sur les pesticides, considérées comme des « régressions environnementales ».
Dans un communiqué daté de la semaine dernière, la Fnab demandait que l’État s’engage à prolonger le crédit d’impôt jusqu’à 2027 et qu’il réalloue le soutien qui ne sera pas dépensé sur la conversion pour maintenir les fermes existantes. Les représentants du bio souhaitent aussi un mécanisme d’urgence pour maintenir les fermes avec une enveloppe « qui s’adaptera à la réalité des pertes sur la base de -20 % de revenu disponible par an, critères définis conjointement entre l’État et la profession ».
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